Mes lectures
J'ai toujours été un très grand lecteur de nombreuses oeuvres, que cela soit des classiques ou des romans plus contemporains (même si un peu moins). Je suis passionné des mots et je pense qu'ils ont une vraie force pour nous porter, stimuler notre imagination et nous guider dans la vie. Toutes les oeuvres qui ont été citées ci-dessous m'ont profondement marqué, et j'ai hâte de vous les faire découvrir même si vous en connaissez sûrement quelques unes.
Le Seigneur des Anneaux, de J. R. R. Tolkien
Un jeune et timide hobbit, Frodon Sacquet, hérite d'un anneau magique. Sous ses apparences de simple bijou, il s'agit en réalité d'un instrument de pouvoir absolu qui permettrait à Sauron, le Seigneur des ténèbres, de régner sur la Terre du Milieu et de réduire en esclavage ses peuples. Frodon doit parvenir, avec l'aide de la Communauté de l'Anneau, composée de huit compagnons venus de différents royaumes, jusqu'à la Montagne du Destin pour le détruire.
Extrait :
Aragorn gravit rapidement la colline. De temps à autre, il se baissait jusqu'au sol. Les Hobbits ont le pas léger et leurs empreintes ne sont pas faciles à interpréter, même pour un Rôdeur ; mais, non loin du sommet, une source traversait le sentier, et il vit dans la terre mouillée ce qu'il cherchait.
« Je vois bien les signes, se dit-il. Frodon a couru jusqu'au sommet. Je me demande ce qu'il a pu y voir. Mais il est revenu par le même chemin, et il a redescendu la colline. »
Aragorn hésita. Il aurait voulu aller lui-même au haut siège, dans l'espoir d'y voir quelque chose qui le guiderait dans ses perplexités ; mais le temps pressait. Soudain, il s'élança en avant et courut au sommet ; il traversa les grandes dalles et monta les marches. Puis, s'asseyant dans le haut siège, il regarda autour de lui. Mais le soleil semblait obscurci, et le monde estompé et distant. Il décrivit un tour complet du nord au nord, mais il ne vit rien d'autre que les collines éloignées, sinon que dans le lointain un grand oiseau semblable à un aigle planait de nouveau haut dans le ciel, descendant lentement vers la terre en larges cercles.
Tandis même qu'il observait, son oreille fine perçut des sons dans la forêt qui s'étendait en dessous à l'ouest de la rivière. Il se raidit. Il y avait des cris et, entre autres, à son horreur, il distinguait la voix rauque d'Orques. Et puis, soudain, résonna l'appel profond et guttural d'un grand cor, dont les échos frappèrent les collines, se répercutant dans les creux et dominant de sa clameur puissante le rugissement des chutes.
- Le cor de Boromir ! s'écria-t-il. Il est en difficulté !
La peste, d'Albert Camus
La Peste, écrit par Albert Camus en 1947, est un roman puissant qui évoque des les thèmes de la condition humaine, la souffrance et la solidarité face à l’absurdité de la vie. L’intrigue se situe dans la ville d’Oran, en Algérie, frappée par une épidémie de peste qui bouleverse la vie de ses habitants. Le roman est découpé en cinq parties, chacune documentant la progression de l’épidémie, les réactions humaines variées, et les dilemmes moraux auxquels les personnages sont confrontés.
Au départ, la ville d’Oran mène une vie ordinaire. C’est une cité portuaire animée mais plutôt monotone. Soudain, des rats morts commencent à apparaître dans les rues, créant un sentiment d’inquiétude parmi la population. Les autorités locales ne prennent pas l’alerte au sérieux, mais lorsque M. Michel, le concierge de l’immeuble du docteur Bernard Rieux, tombe gravement malade et meurt, les soupçons sur une maladie contagieuse se confirment. Rieux, un médecin dévoué mais désabusé par la vie, voit rapidement les signes d’une épidémie de peste bubonique, avec ses ganglions enflés et ses symptômes violents.
Peu à peu, la maladie se propage. Malgré l’inaction initiale des autorités, il devient impossible d’ignorer la situation. Les cadavres s’accumulent, et la panique commence à s’emparer de la population. Oran est alors mise en quarantaine, isolée du reste du monde. Les portes de la ville sont fermées, coupant brutalement les citoyens de leurs proches. Cette mesure transforme le quotidien des habitants, contraints à l’enfermement, et nourrit le désespoir. La ville est désormais dominée par la peur, la douleur, et un sentiment d’abandon.
Extrait :
Elle sifflait doucement au pied des grands blocs de la jetée et, comme ils les gravissaient, elle leur apparut, épaisse comme du velours, souple et lisse comme une bête. Ils s'installèrent sur les rochers tournés vers le large. Les eaux se gonflaient et redescendaient lentement. Cette respiration calme de la mer faisait naître et disparaître des reflets huileux à la surface des eaux. Devant eux, la nuit était sans limites. Rieux, qui sentait sous ses doigts le visage grêlé des rochers, était plein d'un étrange bonheur. Tourné vers Tarrou, il devina, sur le visage calme et grave de son ami, ce même bonheur qui n'oubliait rien, pas même l'assassinat.
Ils se déshabillèrent. Rieux plongea le premier. Froides d'abord, les eaux lui parurent tièdes quand il remonta. Au bout de quelques brasses, il savait que la mer, ce soir-là, était tiède, de la tiédeur des mers d'automne qui reprennent à la terre la chaleur emmagasinée pendant de longs mois. Il nageait régulièrement. Le battement de ses pieds laissait derrière lui un bouillonnement d'écume, l'eau fuyait le long de ses bras pour se coller à ses jambes. Un lourd clapotement lui apprit que Tarrou avait plongé. Rieux se mit sur le dos et se tint immobile, face au ciel renversé, plein de lune et d'étoiles. Il respira longuement. Puis il perçut de plus en plus distinctement un bruit d'eau battue, étrangement clair dans le silence et la solitude de la nuit. Tarrou se rapprochait, on entendit bientôt sa respiration. Rieux se retourna, se mit au niveau de son ami, et nagea dans le même rythme. Tarrou avançait avec plus de puissance que lui et il dut précipiter son allure. Pendant quelques minutes, ils avancèrent avec la même cadence et la même vigueur, solitaires, loin du monde, libérés enfin de la ville et de la peste. Rieux s'arrêta le premier et ils revinrent lentement, sauf à un moment où ils entrèrent dans un courant glacé. Sans rien dire, ils précipitèrent tous deux leur mouvement, fouettés par cette surprise de la mer.
Habillés de nouveau, ils repartirent sans avoir prononcé un mot. Mais ils avaient le même cœur et le souvenir de cette nuit leur était doux. Quand ils aperçurent de loin la sentinelle de la peste, Rieux savait que Tarrou se disait, comme lui, que la maladie venait de les oublier, que cela était bien, et qu'il fallait maintenant recommencer.
Germinal, d'Emile Zola
Un jeune chômeur, Etienne Lantier, se fait embaucher aux mines de Montsou, dans le nord de la France. Il fait connaissance avec une famille de mineurs, les Maheu, et tombe amoureux de leur fille Catherine. Mais celle-ci, qui n'est pas insensible à Etienne, est la maîtresse d'un ouvrier brutal, Chaval. Etienne est révolté par les conditions de vie misérables des mineurs et quand la Compagnie des mines, alléguant la crise économique, décide de baisser les salaires, sa révolte s'exaspère. Rêvant d'une société plus juste, il propage des idées révolutionnaires et pousse les mineurs à la grève.
Les semaines s'écoulent. Les grévistes affamés se déchaînent en une bande enragée aux cris de " Du pain !, du pain ! ". Mais, victimes d'une répression violente, ils se résignent à reprendre le travail. C'est alors que Souvarine, un ouvrier anarchiste russe sabote la mine. Les galeries inondées s'effondrent. De nombreux mineurs périssent. Etienne se trouve bloqué avec Catherine et Chaval. Ce dernier le provoque. Etienne le tue et devient l'amant de Catherine qui meurt d'épuisement dans ses bras. Etienne, sauvé part pour Paris. Il a perdu ses illusions, mais il a le cœur plein d'espoir. Il sait qu'un jour viendra où la force ouvrière, encore en germination, s'organisera pour venir à bout des injustices.
Extrait :
Étienne, depuis deux mois, entretenait une correspondance suivie avec le mécanicien de Lille, auquel il avait eu l'idée d'apprendre son embauchement à Montsou, et qui maintenant l'endoctrinait, frappé de la propagande qu'il pouvait faire au milieu des mineurs.
«Il en est, que l'association en question marche très bien. On adhère de tous les côtés, paraît-il.
- Qu'est-ce que tu en dis, toi, de leur société?» demanda Rasseneur à Souvarine.
Celui-ci, qui grattait tendrement la tête de Pologne, souffla un jet de fumée, en murmurant de son air tranquille : « Encore des bêtises !»
Mais Étienne s'enflammait. Toute une prédisposition de révolte le jetait à la lutte du travail contre le capital, dans les illusions premières de son ignorance. C'était de l'Association internationale des travailleurs qu'il s'agissait, de cette fameuse Internationale qui venait de se créer à Londres. N'y avait-il pas là un effort superbe, une campagne ou la justice allait enfin triompher? Plus de frontières, les travailleurs du monde entier se levant, s'unissant, pour assurer à l'ouvrier le pain qu'il gagne.
Et quelle organisation simple et grande : en bas, la section, qui représente la commune; puis, la fédération, qui groupe les sections d'une même province; puis, la nation, et au-dessus, enfin, l'humanité, incarnée dans un Conseil général, où chaque nation était représentée par un secrétaire correspondant. Avant six mois, on aurait conquis la terre, on dicterait des lois aux patrons, s'ils faisaient les méchants.
«Des bêtises! répéta Souvarine. Votre Karl Marx? en est encore à vouloir laisser agir les forces naturelles. Pas de politique, pas de conspiration, n'est-ce pas? Tout au grand jour, et uniquement pour la hausse des salaires... Fichez-moi donc la paix, avec votre évolution! Allumez le feu aux quatre coins des villes, fauchez les peuples, rasez tout, et quand il ne restera plus rien de ce monde pourri, peut-être en repoussera-t-il un meilleur.»
La Mort à Venise, de Thomas Mann
Gustav von Aschenbach est un écrivain munichois reconnu (et anobli) dans la cinquantaine. Troublé par une mystérieuse rencontre lors d'une promenade, il part en voyage sur la côte adriatique et finit par aboutir à Venise, une ville dans laquelle il ne s'est jamais senti à l'aise. Dans son hôtel du Lido (le Grand Hôtel des Bains), Aschenbach découvre Tadzio, un jeune adolescent polonais qui le fascine par sa beauté. Il n'ose l'aborder et le suit dans la ville de Venise. Aschenbach, en proie à une sombre mélancolie et une sorte de fièvre « dionysiaque », succombe à l'épidémie de choléra asiatique qui sévit alors dans la ville. Il meurt sur la plage en contemplant une dernière fois l'objet de sa fascination.
Extrait :
Tadzio se baignait. Aschenbach, qui l'avait perdu de vue, découvrit bien loin dans la mer sa tête et son bras qu'il levait pour ramer; la mer, en effet, devait être plate à une grande distance. Cependant on semblait déjà s'inquiéter à son sujet; déjà des voix de femmes l'appelaient des cabines, criant de nouveau ce nom qui avait l'air de dominer la plage comme un mot d'ordre et, avec ses consonnes douces, son ou final prolongé avec insistance, avait quelque chose de tendre et de sauvage à la fois : « Tadziou ! Tadziou! » Il revint, traversa les flots en courant, la tête haute, soulevant en écume l'onde qui résistait à ses jambes; de voir cette forme vivante, à la fois gracieuse et rude dans sa prévirilité, se détacher sur l'horizon lointain du ciel et de la mer, surgir telle une figure divine et s'échapper, la chevelure ruisselante, de l'élément liquide, c'était un spectacle à inspirer des visions fabuleuses, quelque chose comme une poétique légende des âges primitifs, rapportant les origines de la beauté et la naissance des dieux. Aschenbach écoutait, les yeux clos, cet écho épique vibrant dans son âme : une fois de plus, il pensa qu'il faisait bon vivre là et qu'il allait rester.
Un peu plus tard, Tadzio, allongé sur le sable, enveloppé dans son drap blanc qui passait sous son épaule droite, et la tête mollement couchée sur son bras nu, se reposait de son bain, et Aschenbach, même sans fixer les yeux sur lui, n'oubliait guère tout en lisant quelques pages de son livre que le jeune garçon était étendu là et qu'un léger mouvement de la tête vers la droite suffirait pour lui donner l'admirable spectacle. Il lui semblait pour ainsi dire qu'il était là pour protéger le repos de l'enfant, que tout en s'occupant de ses propres affaires il devait garder avec une infatigable vigilance l'idéal de belle humanité qui se trouvait sur sa droite, non loin de lui. Et son cœur était rempli et agité d'une tendresse paternelle, de l'inclination émue de celui dont le génie se dévoue à créer la beauté envers celui qui la possède.